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Actualité

2022-06-01

Entretien croisé : Nadia Brosset et Emmanuelle Hay

https://parfid.fr/actualite/entretien-croise-nadia-brosset-et-emmanuelle-hay/

Nadia Brosset, architecte du projet PARFID, est experte en formation. Elle a co-animé avec Emmanuelle Hay le programme de formation en andragogie à Brazzaville.

Emmanuelle Hay est Directrice territoriale, responsable du service « évolution, reconversion professionnelle et certification » au Centre National de la Fonction Publique Territoriale (CNFPT) en France.

Question : Tout d’abord, quelles sont les spécificités de votre formation ? Quels sont ses objectifs et son public ? Quelle a été votre approche en tant que formatrices, et quel impact avez-vous constaté sur les participants ?

Nadia Brosset : La session de formation en andragogie de Brazzaville, en République du Congo, était la 6ème session de notre programme de formation en andragogie. Cette formation constitue l’une des composantes du projet PARFID, et doit poser les bases de travail d’autres activités à venir.

En effet, la formation de formateurs doit renforcer les capacités d’agents déjà formateurs, à la douane et aux impôts, afin de renforcer les autres composantes du projet. Par exemple en ce moment, le PARFID dirige un atelier de création de modules à Abidjan ; c’est tout à fait le genre d’actions qui doit faire suite à une formation à l’andragogie.

Nous avons bénéficié d’un très bon accueil par la Direction générale des Douanes.

Emmanuelle Hay : Cette session était la première que je co-animais dans le cadre du projet. Les bénéficiaires ont participé très activement, toujours volontaires pour les travaux de groupe et leur restitution. Le public était très ouvert à la pédagogie active. Pour les formateurs c’est un vrai bonheur, et ça facilite beaucoup la tâche !

Je pense que durant ces trois jours, les stagiaires ont vraiment découvert des façons de faire qu’ils ne connaissaient pas en andragogie. Ces nouveautés les ont un peu déconcertés ; ils ont vite compris tout ce que ça pouvait leur apporter. Nous nous sommes efforcées de leur donner des outils. Par exemple, le photolangage, le brainstorming, ou les métaplans.

Le dernier jour, nous avons pu proposer une mise en situation, où les stagiaires ont mis en oeuvre ce qu’ils avaient appris comme s’ils étaient eux-mêmes formateurs. Je pense qu’ils ont compris à quel point cette simulation était formatrice : en simulant, ou en regardant leurs collègues, ils ont pu voir ce qu’il fallait faire ou ne pas faire.

Avec Nadia, nous nous sommes efforcées de montrer qu’outre la dimension purement logique, quand on dispense réellement la formation, il y a une posture à avoir, une manière de communiquer et d’être en relation avec le public. C’est quelque chose qu’on ne peut comprendre qu’en le faisant. Nous pensons toutes les deux qu’on le leur a bien montré et qu’ils l’ont compris. Nous souhaitons vivement qu’ils puissent mettre en application ce qu’ils ont appris assez rapidement ; c’est comme ça que c’est vraiment efficace.

Nadia Brosset : Pour compléter et rebondir sur ce que dit Emmanuelle, ce qui est très important, c’est que cette formation est un véritable renforcement de capacités. Nous ne partons pas de zéro : nous avons affaire à un public, plus ou moins homogène – certains n’ont jamais fait de formation, mais c’est rare et marginal. Le public est globalement déjà formé et actif. Nous sommes là pour les aider à faire un arrêt sur image sur leur propre pratique de la formation. Nous devons leur servir de miroir, c’est-à-dire les aider à voir leurs propres pratiques et comment les améliorer. Pendant ces trois jours, nous leur demandons non seulement de participer aux travaux, mais aussi de s’imaginer à notre place. Nous insistons fortement sur cette dimension en début de formation, dans le but de développer leur réflexivité. Cela fonctionne bien.

En les questionnant sur leurs attentes, que ce soit avant le début de la session ou en séance, certains disent avoir déjà suivi des formations de formateurs, voire estiment avoir déjà un niveau expérimenté. Cependant, tout ce qu’on leur apporte les déstabilise quand même un peu ; c’est différent de ce qu’ils ont vu avant. Nous avons une approche complètement déstructurée de la fonction de formateur, et nous mettons directement nos pratiques en action, dès le premier jour. Ils sont un peu surpris, ils s’attendent à avoir plus de théorie, et en fait notre travail est essentiellement pratique. Nous essayons de leur faire comprendre ceci : un formateur n’est pas quelqu’un qui connaît tout et qui vient dérouler son savoir ; c’est un animateur, qui va emmener le groupe vers le résultat, c’est-à-dire vers l’apprentissage.

Quelles ont été les séquences de la session de formation ? Quel était son programme ?

Nadia Brosset : Nous leur avons montré la façon dont nous-mêmes, nous nous sommes organisées pour notre co-animation ; ça fait partie du miroir. Ils sont très peu habitués à co-animer, c’est une pratique qu’ils ont découverte. Nous avons fait en sorte que notre co-animation soit très vivante.

Les participants ont aussi découvert qu’en étant formateur, on doit être méthodique, autant dans la préparation de la formation elle-même que dans la connaissance du contenu. Ici comme partout ailleurs, le scénario pédagogique est une découverte majeure, c’est quelque chose qu’ils ne connaissaient pas ; ils ont été intéressés par cette méthode qui permet d’organiser le travail. Avec Emmanuelle, nous avons travaillé à partir de scénarios pédagogiques ; nous nous sommes réparti le travail pour que ça soit très dynamique. Nous devons leur montrer comment nous faisons pour animer, y compris animer à deux, de façon à ce que chacun ait sa place. Ce dynamisme favorise l’interactivité pour tous les participants. Depuis le début des formations, personne ne s’est endormi dans la salle, malgré des journées longues !

Emmanuelle Hay : Il y a trois grandes séquences dans la session : une séquence sur les particularités de l’andragogie, ses modes de faire et la posture du formateur ; une séquence de travail sur la méthodologie du formateur et son travail préparatoire ; et enfin la séquence des mises en situation. Le gros point fort de cette formation, ce sont ces mises en situation, qui interviennent dès le premier jour ; tout le monde est en atelier pour travailler de façon interactive.

Nous nous sommes d’abord attachées à travailler les spécificités de la formation professionnelle pour adultes, l’andragogie, et ses différences par rapport à la pédagogie pour enfants.

Ensuite on est passés à la méthodologie de construction d’une action de formation. On a vu comment on analyse la demande, comment on produit ou on co-construit un cahier des charges, comment on prépare le scénario pédagogique (séquences, durée des séquences, méthode pédagogique, objectif pédagogique, supports, modalités d’évaluation).

Quant à l’évaluation, on a expliqué que c’était un processus, qui commence dès le début de la formation. On a travaillé avec eux les différentes méthodes pédagogiques existant, les différents supports, les différentes techniques d’animation ; ensuite on a abordé la question des compétences du formateur. On a vu comment on organise une formation sur le plan logistique, matériel, pratique – pour que ça soit efficace. Ensuite on les a laissé travailler en autonomie, pour préparer leur propre séquence de formation, qu’ils ont présenté devant tout le groupe, la dernière après-midi. Enfin, nous avons terminé par le bilan de la formation, le questionnaire d’évaluation, et la cérémonie de remise des attestations.